Appelfeld Aharon
Aharon Appelfeld a écrit plus de 40 livres, principalement des recueils de nouvelles et des romans. Bien qu'ayant appris l'hébreu sur le tard, Appelfeld est un des auteurs les plus brillants en langue hébraïque (sa langue maternelle est l'allemand). Appelfeld fait souvent ce cauchemar: « Parfois je me réveille, avec l'angoisse que cet hébreu acquis avec tant de peine disparaît. Je veux l'attraper, je ne peux pas ». La majorité de ses écrits concerne la vie de la population juive en Europe avant et durant la Seconde Guerre mondiale. Il y livre à chaque fois un pan de sa propre vie. Ses héros sont des Juifs assimilés, qui ne se reconnaissent pas dans une identité juive. Ils sont d'autant plus désarmés lorsqu’ils doivent affronter leur destin de Juifs. Pour montrer l'écroulement du monde autour de ses personnages il décrit un monde d'inquiétante étrangeté, d'espaces qui se rétrécissent, d'horaires qui se dérèglent, de trains sordides qui roulent dans des paysages indistincts. Il évoque en particulier, sa propre expérience de survie dans la forêt de Bukovine, alors âgé d'une dizaine d'années seulement, peut se retrouver dans certains de ses livres comme Tsili ou L'Amour, soudain. Aharon Appelfeld décrit aussi des rescapés incapables de se libérer d’un passé douloureux qui les poursuit, incapables de se forger une vie nouvelle. Aharon Appelfeld peut être défini comme un arpenteur de la trace et surtout de l'absence qu'il fouille jusqu'à la moelle du grand vide. Il refuse cependant d'être considéré comme un écrivain de la Shoah : « Je ne suis pas un écrivain de l'holocauste et je n'écris pas sur cela, j'écris sur les hommes juifs. » L'écriture d'Appelfeld est à la fois claire et à double-fond : elle est symbolique tout en faisant référence à des actions du quotidien apparemment les plus anodines ; elle évoque les événements de l'histoire mais de manière souvent vague et comme détournée ; en même temps elle s'ouvre aux mythes du peuple juif. Appelfeld est soucieux de détails troublants mais presque cliniques, ce qui lui permet de créer un monde proche et étrange. Il utilise une écriture par petites touches, subtiles, précises, où parfois surgit la violence la plus cauchemardesque. Ses scènes sont souvent brèves, ses héros des narrateurs parfois muet comme Tzili, le plus souvent inaccomplis, étranger qui ne peut revenir dans le pays de son enfance. Le poids des silences est important dans son œuvre. Appelfeld capte surtout des regards, des sourires ou de larmes. L'écriture d'Appelfeld n'est pas réaliste, mais elle refuse le lyrisme et la poésie. Appelfeld est également l'ami de l'écrivain américain Philip Roth, et apparaît dans un de ses romans (Opération Shylock). Pour Roth, ce qu'Appelfeld nous apprend de la nature humaine est à la hauteur littéraire de Franz Kafka et de Bruno Schulz. Les écrivains qui ont influencé Appelfeld sont Kafka, Proust et Tchekhov mais la Bible sur le plan esthétique surtout.