Les pays. Marie-Hélène Lafon
Un peu d’histoire…
Tout commence au salon de l’agriculture où une famille se rend… Ils sont originaires du Cantal et ne connaissent pas du tout la capitale, ce qui leur cause bien du souci. La fille, Claire, va retourner à Paris, où elle fera ses études à la Sorbonne en Lettres classiques. Après sept années passées dans un internat religieux, le choc est brutal…Elle y découvre des références qu’elle n’a pas, des écrivains qu’elle n’a jamais lus. Claire ressent plus que jamais son appartenance à une classe sociale à propos de laquelle le milieu intellectuel parisien ne fait pas grand cas. Mais si elle ne maitrise pas les codes et les références d’usage, elle a le goût du travail. C’est ainsi que commence sa vie d’étudiante, une vie besogneuse, une vie solitaire aussi…
Un peu d’avis…
Comme à chaque rentrée littéraire, on n’échappe pas aux sacro-saintes autofictions qui me donnent envie de me mettre la tête dans le four jusqu’à ce que mort s’ensuive. Les Pays, aura tout de même le mérite de ne pas être une glorification ou –pire encore- une auto-flagellation. Soit. Lafon distille dans une écriture subtile une atmosphère tour à tour surannée et moderne, contemplative et vive, sombre et légère. Il se dégage un certain charme de ces pages où le personnage découvre la vie parisienne et –surtout- la Sorbonne avec ses profs, ses amphis, ses goûts, ses modes… Claire y mesure chaque jour le gouffre de son inculture, au contact des professeurs –certes- mais aussi de ses camarades qui n’appartiennent pas au même monde et ne s’en cachent pas. Toutefois, parce que la vérité est parfois très cruelle, Lafon la maquille en tentant de nous faire croire que la bêtise n’est sûrement pas là où l’on croit. D’accord. Le lecteur -et c’est le moins que l’on puisse dire- ne sera pas bouleversé par les idées déversées dans Les Pays : la bonne morale y est sauve…
Il y a fort à parier que certains lecteurs retrouveront des sentiments familiers dans la description de ces années où labeur rime avec (je fais une pause dont l’effet est censé être tragique) torpeur. Claire ne maitrise pas les codes parisiens, ne fréquente pas les musées et peine souvent à décrypter le comportement de ses camarades. Mais grâce à son incommensurable énergie (bâillement d’ennui), elle va pouvoir rétablir ce dont son milieu social l’a spoliée, à commencer par des connaissances académiques, celles-là mêmes que tout élève est censé avoir acquis au sortir du lycée. Cet apprentissage se révèle moins excitant que déstabilisant pour cette jeune fille qui se demande parfois ce qu’elle fait là (et nous aussi).
Le lecteur comprend vite que Claire n’a pas plus d’accointances avec le milieu paysan que Sarkozy avec Mme de La Fayette. Aussi, ce qui semblait être le roman de la revanche sociale se révèle finalement être avant tout celui de l’incompréhension familiale. Mais que nous importe de quoi parle le livre et ce qu’il peut bien signifier… Le fond importe visiblement moins que la forme à Lafon qui travaille son écriture avec ferveur pour le plus grand bonheur des littérateurs auxquels est manifestement destiné son livre. Aussi, elle prend grand soin de travailler sa phrase et dit des choses très simples avec une syntaxe complexe, ce qui plombe un style pourtant pas si mauvais. Malgré une écriture à laquelle on pourra trouver des qualités, il ressort de la lecture desPays un ennui mortel. Le lecteur assiste aux déconvenues de Claire en priant secrètement (insérer ici le nom de qui vous voudrez) de mettre fin à son supplice. Ce roman d’apprentissage se révèle en effet d’une triste banalité. On en vient à se demander pourquoi l’écrivain s’inflige cela…et –plus que tout- pourquoi elle nous l’inflige à nous, lecteurs, qui n’avions rien demandé. Heureusement, dans sa grande bonté, Lafon a écrit un texte court : qu’elle en soit remerciée ! Au final, Les Pays doit être considéré uniquement pour ce qu’il est : un livre sans aucun attrait.
Les pays, Marie-Hélène Lafon, Buchet Chastel, ISBN 978-2-283-02636-6